Podemos veut exporter son modèle en Europe – Les Inrockuptibles, 01/06/2015

Article de Jean-Christophe Catalon sur la sorite du manifeste « Podemos, sûr que nous pouvons ! », publié dans Les Inrockuptibles le 1 juin 2015.

Le leader de Podemos, Pablo Iglesias, en conférence de presse le 28 mai 2015 à Madrid. (Reuters/Juan Medina)

Le leader de Podemos, Pablo Iglesias, en conférence de presse le 28 mai 2015 à Madrid. (Reuters/Juan Medina)

« Fort de ses succès aux élections municipales en Espagne, le parti des Indignés veut promouvoir d’autres façons de faire de la politique. Ses leaders publient un manifeste, “Podemos, sûr que nous pouvons !”. Un mode d’emploi à appliquer à toute l’Europe.

Podemos a le vent en poupe. Grâce à ses performances inattendues lors des élections municipales en Espagne, le parti des Indignés est en passe de remporter les villes de Madrid et Barcelone. Ses leaders rêvent d’un avenir à la Syriza, en remportant les élections générales de novembre prochain. Mais pas seulement.

En publiant Podemos, sûr que nous pouvons ! (traduction de Claro que Podemos, éditions Los libros del lince, 2014) Carolina Bescansa, Íñigo Errejón, Pablo Iglesias et Juan Carlos Monedero, les quatre instigateurs du mouvement, entendent exporter leur modèle. Dans ce livre-manifeste, ils reviennent sur la création du mouvement, entre innovation politique et inspiration post-marxiste. L’ouvrage sera d’abord disponible en France, Belgique, Suisse et Québec. Si les dates ne sont pas fixées, son éditeur français Indigène (également éditeur du best-seller Indignez-vous !  de Stéphane Hessel) s’efforce de le distribuer dans toute l’Europe, voire dans le monde.

Adapter son discours à son époque

Anciens étudiants en sciences politiques de l’université Complutense à Madrid, les quatre futurs leaders de Podemos ont décidé d’appliquer à la réalité ce qu’ils ont appris dans les amphis. Influencés par les théories post-marxiste d’Antonio Gramsci et du couple Ernesto Laclau et Chantal Mouffe, ils plaident pour une démocratie radicale. Autrement dit, faire appliquer dans les faits les idéaux et valeurs de la démocratie.

Mais pour Iglesias et ses complices, le vocabulaire théorique n’est pas suffisamment intelligible pour les citoyens. Les notions “d’antagonisme des classes”, de “prolétariat” et de “bourgeoisie”, sont trop connotées, trop floues, trop conceptuelles, presque ésotériques. Alors les futurs leaders de Podemos décident de garder le contenu, mais de modifier la mise en page. “Ils ont inventé un discours audible, qui n’est pas détourné de son sens”, souligne Sylvie Crossman, directrice des éditions Indigène. Désormais, il est question de “caste”, de pouvoir “financier”, qui s’est“accaparé la démocratie à son profit”. Un discours clarifié et diffusé via l’émission La Tuerka.

La Tuerka : “Le coup de génie”

“Si les médias ne viennent pas à toi, deviens toi-même le média”, écrit Pablo Iglesias. En Espagne, la droite monopolise le débat politique à la télé, boudée par la gauche. Alors pour se faire connaître, Iglesias et ses camarades créent leur propre émission en 2010. Intitulée La Tuerka (l’écrou), elle est diffusée sur une chaîne communautaire madrilène. Des débats politiques y sont présentés (ainsi ci-dessous, une rencontre avec Thomas Piketty)  et Pablo Iglesias s’exerce chaque soir au “monologue”, des interventions courtes sur un sujet d’actualité ou d’histoire, souvent avec un ton piquant.

“Les gens croient que pour militer il faut entrer dans les partis ou dans les collectifs politiques, mais ce n’est pas vrai, les gens militent d’abord à travers les médias. Les gens engagés se reconnaissent dans des journaux, des radios, des télés… beaucoup plus que dans des partis”, détaille Pablo Iglesias dans le livre.

L’émission gagne en audience au fils du temps. En janvier 2014, le parti Podemos est officiellement créé. Pablo Iglesias s’impose comme leader et continue de présenter l’émission.La Tuerka leur a permis de s’imposer dans les médias, décrit Sylvie Crossman.C’est un coup de génie”.

Elections générales, la prochaine étape

Alors qu’ils n’avaient fait entrer que cinq représentant au Parlement européen, dont Pablo Iglesias, aujourd’hui Podemos pèse de plus en plus dans le paysage politique espagnol. Les résultats des municipales en sont la preuve. Les derniers sondages publiés par El Pais donne le parti en tête des élections générales de novembre 2015. Iglesias et ses camarades pourraient accéder à la Mancloa (le Matignon espagnol).

Les membres de Podemos croient en ce modèle et veulent que leurs voisins européens y croient aussi. La publication de Podemos, sûr que nous pouvons ! répond à cette envie. Selon Sylvie Crossman : “Ils veulent dire aux Européens, regardez, on a réussi et vous pouvez le faire aussi.”

PODEMOS, Sûr que nous pouvons ! par Carolina Bescansa, Íñigo Errejón, Pablo Iglesias et Juan Carlos Monedero, sous la direction de Ana Domínguez et Luis Giménez. Traduit de l’espagnol par Martine Sicard. En librairie le 4 juin 2015, 128 pages, 10 € »

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