Banderoles et calicots ont à nouveau envahi les rues, ce dimanche. Aux quatre coins du pays, des centaines de milliers de personnes (dont 72 000 à Madrid) ont répondu à l’appel des syndicats afin de protester encore et toujours contre l’austérité et les dérives autoritaires du gouvernement. Des manifestations étaient ainsi organisées dans 57 villes.
Mais les syndicats n’étaient pas les seuls à être descendus dans la rue pour se faire entendre. L’organisation Derecho a Vivir (Droit de Vivre) avait également mobilisé ses troupes. Environ 2 000 de leurs sympathisants ont défilé dimanche entre la Puerta del Sol et la Puerta de Alcalá pour réclamer l’interdiction de l’avortement.
Cette action, qui a trouvé écho dans une centaine d’autres villes, intervient alors que le ministre de la Justice Alberto Ruiz-Gallardón annonce depuis plusieurs mois la réforme de la loi sur l’avortement votée en 2010 par le gouvernement Zapatero. Celle-ci autorisait l’interruption volontaire de grossesse jusqu’à 14 semaines sans justification, 22 semaines en cas de risque pour la mère ou de malformation du fœtus et l’autorisation pour les filles de 16 et 17 ans de se faire avorter sans l’accord de leurs parents.
Alberto Ruiz-Gallardón précisait au mois de septembre dernier que la future loi n’autoriserait plus l’interruption que dans deux cas de figure : en cas de viol et de danger pour la mère. Deux exceptions de trop pour Derecho a Vivir dont le slogan est « Aborto cero », avortement zéro.
Interdit sous Franco, l’avortement a été introduit pour la première fois en Espagne en 1985 par le gouvernement socialiste de l’époque. Le texte dépénalisait l’IVG jusqu’à la douzième semaine en cas de viol et la vingt-deuxième en cas de risque pour la mère ou de malformation du fœtus. L’actuel projet de loi exclut cette dernière possibilité ce qui a provoqué l’émoi au sein de la population. Selon un sondage du quotidien El Pais, 81% des Espagnols (dont 65% des électeurs du Parti populaire au pouvoir) sont opposés à cette mesure. Plusieurs actions de protestation ont eu lieu et des pétitions ont circulé. Sans succès.
Cette réforme serait un fameux retour en arrière pour l’Espagne, à l’image de ce qui s’est passé en Pologne où l’avortement a été autorisé pendant 40 ans avant d’être interdit à partir de 1997. Aujourd’hui, au sein de l’Union européenne, seuls Malte et l’Irlande ont des lois encore plus restrictives.